Compte-rendu de la journée
« Espace » à ‘UTBM le 5 juin 2008
Journée organisée par : l’UTBM, le « Pavillon des Sciences » et le CNES.
Lieu : UTBM – Sévenans
(90)
Participation : très bonne, 200 personnes
assistèrent à la conférence dans l’amphithéatre P228
Participants URIS FC : Pascal BELLIER (INSA) - Jean-Pierre
BULLIARD (INSA) – Pierre FONTAINES (INSA) – Jean RESTLE (INSA) - Jean-Paul
WALTER (INSA) et ses deux fils – et quelques autres non répertoriés ici.
Intervenants et
Organisateurs : Pascal
FOURNIER, Directeur de l’UTBM, organisateur, Aude
PETIT, organisatrice, Responsable des affaires générales et culturelles à
l’UTBM ; François LACHAMBRE, professeur
de physique au lycée VIETTE, accompagné de 4 lycéens ; Pascal REMOND,
Pavillon des Sciences, Nicolas PILLET, Ingénieur au CNES à Toulouse et
conférencier.
1) La journée commence par
une exposition : stands et animation de 14h30 à 17h00
·
1.1) Le
Lycée Jules VIETTE à Montbéliard présente les expériences menées en impesanteur
en liaison avec le CNES dans un AIRBUS A300
Elèves
en discussion Elèves
en expérimentation
·
les élèves de première S du lycée Viette
présentent leurs maquettes pour étudier quelques phénomènes physiques en
absence de pesanteur :
·
1.2) Le
Club d’Astronomie de l’UTBM présente son téléscope et de belles photos des planètes
Le stand du club Astronomie de l’UTBM Pascal
Rémond et Aude Petit, les organisateurs
·
1.3) Le
Club Espace de Bourogne présente les
fusées qu’il a lancées. Les plus grandes sont montées à 1500m et ont été
récupérées grâce à leur parachute visible dans le compartiment inférieur.
Quelques
fusées présentées Pascal
Rémond et Nicolas Pillet du
CNES
Ce club,
réduit actuellement à un effectif de 3 membres, veut relancer son activité de
fabrication et lancement de fusées. Avis aux amateurs !
2) La journée se poursuit à
20h00 dans l’amphithéatre P228 par le retour
d’expérience sur l’impesanteur
Eliott,
lycéen au club scientifique du Lycée VIETTE, présente les 4 expériences
envoyées dans l’espace et préparées par lui et ses camarades.
Expérience
1 : mouvement d’un pendule pesant en impesanteur : dès que l’avion passe en dessous du
seuil de 0,05g, le pendule se met à tourner à 360 degrés autour de son axe. Au
moment de l’obtention d’un g<0, le pendule oscille en haut de son axe –
expérience réussie.
Expérience
2 : la pesanteur attire-t-elle toujours vers le bas ? Dans le récipient rempli d’eau qui
contient des billes oranges d’une densité > 1 et des billes blanches d’une
densité < 1, lorsque la pesanteur existe, ces billes sont séparées :
les billes blanches flottent, les billes oranges s’agglutinent au fond du
récipient. Lorsque l’avion passe en impesanteur (<0,05g), les billes se
mélangent au milieu du récipient, elles perdent leur poids – expérience
réussie.
Expérience
3 : Peut-on faire bouillir de l’eau en impesanteur ? Une résistance chauffante est
immergée dans un récipient d’eau. En impesanteur, on voit un film de vapeur
d’eau se former autour de la résistance chauffante car il n’y a plus de
mouvement de convection de la chaleur – expérience réussie.
Expérience
3 b : y a-t-il du tirage en impesanteur ? Un résistance chauffante est
alimentée à courant constant : on la voit rougir beaucoup plus en
impesanteur, ceci est du à l’absence de courants de convection qui,
normalement, la refroidissent. – expérience réussie.
Expérience
4 : peut-on déplacer à distance avec un aimant un métal non magnétique
(morceau de cuivre).
On veut mettre en évidence la force de Laplace qui existe, même faible, avec
des matériaux non - magnétiques. Mais hélas, en impesanteur, le phénomène est
parasité par les turbulences de l’avion et le morceau de cuivre est chahuté
mais n’est pas attiré par l’aimant. expérience non
réussie. Le champ magnétique est trop faible devant les autres forces qui
interviennent.
Xavier, autre lycéen du même lycée, nous
fait part de son expérience de « zéronaute ».
C’est lui qui eut la chance de monter dans cet Airbus A300, décollant un beau
jour de février 2008 à 9h30 de l’aéroport de Bordeaux Mérignac. On lui a
ingurgité une bonne dose de nautamine pour éviter les
effets indésirables du « mal de l’air ». L’avion s’est mis rapidement
en vol parabolique (incidence de 47 degrés), passant d’une séquence
d’accélération à 1,8g puis un passage de 10 mn en impesanteur (moins de 0,05g).
Xavier raconte qu’il n’a que 10 mn pour réaliser ses 5 expériences. Il nous
fait part de cette étonnante sensation en impesanteur : il flotte dans la
cabine, il ne sent plus son corps. Il est persuadé d’avoir été un privilégié
(le seul ayant volé parmi son équipe de 12 copains). Il aura aussi enregistré 4
heures de vidéo, excellent souvenir de cette journée.
Laura, autre lycéenne confirme que cette
expérience scientifique a été complète depuis la conception jusqu’à la
réalisation finale. Pour elle, l’expérience lui a fait toucher des domaines
très divers de la science : électricité, mécanique, mathématiques (par
intégration de relevés d’accélération donnés par l’accéléromètre, on obtient à
chaque instant le vecteur vitesse de l’avion). Elle a pu trouver une anomalie
entre les mesures réelles de l’altimètre et la simulation mathématique, ce qui
a permis de faire une légère correction des engins de vol. Elle a compris « l’effet
Marangoni », c’est un phénomène dynamique de
physique au cours duquel un gradient de tension interfaciale provoque un
mouvement des fluides adjacents et réciproquement.
3) Nicolas PILLET termine la
soirée par un brillant exposé sur la propulsion spatiale
Aude
PETIT prépare la conférence Un
amphi bien rempli et attentif
Nicolas
PILLET est
ingénieur au CNES depuis 15 ans. Il est ingénieur de l’Ecole d’Aéronautique de Poitiers.
Au CNES, il est désormais en charge des projets scientifiques avec le monde
étudiant. Nicolas commence par remercier les lycéens du Lycée Jules VIETTE. Il montre tout l’intérêt amené par cette
collaboration avec ce lycée. Il rappelle que 3 équipes d’étudiants sont
sélectionnées chaque année pour un projet lié au vol parabolique. Il appelle l’UTBM à concourir à ces projets.
La
propulsion en orbite d’un satellite artificiel : Nicolas prend l’exemple de l’ATV européen « Jules Verne ». L’ATV est une sonde spatiale qui vient de réussir son
amarrage à la Station Spatiale Internationale (ISS) à 400 km
d’altitude. Le satellite « Jason » fait de l’altimétrie. Les
satellites de Télécommunication sont en orbite géostationnaire à 36000 km d’altitude.
La
propulsion spatiale
est basée sur le principe physique de l’action et de la réaction : il faut
éjecter une masse de gaz le plus vite possible pour augmenter la vitesse de DV. Les moteurs de propulsion d’un
satellite sont chargés de circulariser l’orbite de celui-ci par une approche de
réduction successive elliptique. On parle alors de vaisseau
« orbiteur ». Une mission de retour d’échantillons de mars n’est pas
encore réalisée, la propulsion consiste alors à faire descendre un « lander » (attérrisseur) pour
y faire du carottage au sol.
INTELSAT
10 pèse 5600 kg –
dont 2000 kg de carburant chimique et 200 kg de Xénon pour la propulsion
électrique. C’est un satellite de Télécommunications navigant sur orbite
géostationnaire à 36000 km d’altitude.
SPOT 5 –
LEO est un satellite
sur orbite basse finale de 832 km, lancé par la fusée
ARIANE 4, il permet de faire des photos d’atolls terrestres avec une Haute
Résolution Graphique (HGR) de 5 m. Il pèse 3200 kg dont 158 kg de carburant
chimique.
SMART 1
– LUNAR PROBE est
une petite sonde lunaire de 367 kg dont 10 kg de carburant chimique et 80 kg de
Xénon pour la propulsion électrique.
Les
propulseurs sont
des moteurs placés dans toutes les directions du satellite (selon les 3 axes x,
y, z)
Equations
de la propulsion : P = mV (P = Poussée – m = masse de débit – V = vitesse
d’éjection du gaz)
On définit
une impulsion spécifique Isp (en seconde), indicateur de performance, quotient
de la force de propulsion par le poids de carburant, c’est le temps qu’il faut
(en secondes) pour consommer 1 kg de carburant en poussant de 1 Newton. Isp
= F / m.g0.
La perte de
masse s’écrit : DM = M0.{ 1 – exp (-DV / g0. Isp } où M0 désigne la masse initiale de la sonde et DM, la consommation de carburant.
A bord d’un
satellite, la puissance électrique disponible est d’environ 5 kW.
Les
types de propulsion :
0,1 1 10 1000 104 105
Le
principe de la propulsion consiste à introduire un fluide dans un propulseur et d’éjecter du gaz chaud.
La propulsion transforme de l’énergie (chimique, électrique ou
électromagnétique) en énergie cinétique, avec un rendement global : n
1) propulsion
à gaz froid :
on a un réservoir de gaz sous pression (de l’azote comprimée à 200 bars) que l’on
évacue dans une tuyère. Ce type de propulsion ne permet que de faibles poussées
(10 mN).
Exemples :
la propulsion de SMAP1 / GALILEO au gaz butane (université de Surrey)
Le
satellite GRACE (radar à basse altitude)
2) La propulsion
hydrazine : le
fluide est du N2H4. On produit des gaz chauds (NH3,
H2, N2). On a un seul fluide en décomposition
catalytique. Exemples : le satellite SPOT5 qui propulse 1 Newton. PROTEUS
et MYRIADE. Ils ont des performances intéressantes mais le fluide hydrazine est
toxique et demande de grandes précautions d’utilisation. Le catalyseur est fait
par des grains d’alumine poreux Al2O3, avec dépôt d’une
phase active d’Iridium. Il faut préchauffer. On décompose ainsi 100 kg
d’hydrazine par gramme de catalyseur. Mais cette approche est empirique.
3) La propulsion Résistojet et électrothermique : on chauffe le gaz de
stockage, ce qui accroît la vitesse d’éjection.
4) La propulsion biliquide : il y a deux circuits fluides (un oxydant et un réducteur).
On obtient des moteurs de 500 mm qui poussent 500 N et des petits moteurs de
contrôle à 20 N. Les matériaux doivent résister à la chaleur. La température
atteint 4000 ° K dans la chambre de combustion. Il y a donc nécessité de
refroidir les parois. Exemples : le cargot
européen ATV qui comporte 26 moteurs de contrôle à 200 N .
Le SHUTTLE (navette américaine) qui a des moteurs de 30 kN pour les manœuvres
orbitales, de 4 kN pour le contrôle et de 100 N pour l’attitude de rentrée dans
l’atmosphère. Cette phase est très critique pour les aéronautes qui subissent
alors des poussées de 9g.
Les
matériaux pour les chambres et tuyères sont : le nimomic
(supporte 1300 °K), le Columbium (1500 °K), le Platinium
(SiC composite à 1900 °K et Rhénium 2500 °K avec
dépôt d’Iridium).
5) La propulsion hybride : On combine un oxydant liquide (H2O2,
N20) avec un réducteur (fuel) solide (polyéthylène). On obtient des
résultats simples, non - toxiques, et non – pyrotechniques. Exemple :
SPACESHIP ONE aux USA.
6) La propulsion électrique
4000 1000
La courbe
précédente compare la propulsion électrique à la propulsion chimique. Elle
montre la masse de proprellant nécessaire pour
laisser en orbite un satellite artificiel pendant 15 ans en fonction de l’Isp
(en secondes). La courbe montre qu’il faut 1 tonne de carburant chimique pour
200 kg seulement en électrique. La puissance électrique est de 0,1 à 10 kW.
Mais la poussée est faible (F < 1 N).
Exemple :
ARCJET Le moteur est formé d’une tuyère avec détente d’un jet. L’énergie de
base est un arc électrique déchargé entre une cathode et une anode. Le fluide
allumé est de l’hydrogène, chauffé puis détendu électriquement.
7) La propulsion
électromagnétique :
consiste en l’ionisation d’un gaz (exemple : de l’Argon) et en la
production d’un courant intense dans le plasma. Un champ magnétique induit
accélère les ions par force de Lorentz. Exemple : MPD THRUSTER
(propulseur). On obtient en sortie un jet de plasma accéléré par effet
électromagnétique.
8) La propulsion ionique à
grille : on
crée un plasma Xénon dans la chambre à décharge. On accélère alors le plasma à
travers des grilles sous l’effet d’un Champ Electrostatique intense (V = 3000
volt). Le gaz peut partir avec une vitesse de 40 km/s
en sortie de la tuyère. Exemple : NSTAR (Nasa/Boring) :
P = 2,5 kW
– F = 90 mN – Isp = 3100 s
SONDE DEEP
SPACE 1 : sonde envoyée vers une comète lointaine par les américains.
9) La propulsion à effet
Hall : on crée
une décharge de gaz (Xénon) dans le canal central. On soumet ce gaz à un champ
magnétique radial et électrique axial générant l’accélération des ions. On
produit alors un courant de Hall. On neutralise en aval le jet par un
bombardement électronique (pour neutraliser électriquement les ions qui
sortent).
Actuellement on passe en moyenne 1
heure par jour de propulsion pour réajuster sur leur orbite les satellites
géostationnaires.
Le problème
est la durée de vie des moteurs (environ 10000 heures)
Exemples : SNECMA PPS 1350 : P = 1,5 kW – F
= 85 mN – Isp = 1700 s –
STENTOR – SMART1 – SPACEBUS – ALPHABUS
Le contrôle d’orbite des
petits satellites scientifiques : le satellite “MICROSCOPE” (FEEP) pèse 190 kg , il réalise des micropoussées
de 10 mN.
Le transfert d’orbite se fait par technologie ionique à
grille : USA, Europe, Japon et par Effet Hall en Russie
Les panneaux solaires ont un rendement dans l’espace de
30% (environ deux fois supérieur au rendement au sol). Mais il y a des pertes
thermiques sur les capteurs solaires et dans le moteur (qui chauffe).
SMART1 a
une propulsion à effet hall en Europe. Cette sonde a été lancée par ARIANE 5 le
27 septembre 2003. On a réalisé le transfert GTO – Lune. Elle totalise 5000 h
de fonctionnement de son propulseur PPPS1350. Elle a été placée sur son orbite
lunaire depuis janvier 2005 et a été écrasée sur la lune le 3 septembre 2006.
Contrôle d’orbite des
satellites géostationnaires : 4 propulseurs sont montés sur 2 modules pour un contrôle 2
axes. Il y a des tirs quotidiens. La première application commerciale en Europe
fut INTELSAT10 lancé en juin 2004 avec des moteurs russes. Les réservoirs sont
sous pression à 20 bars avant l’injecteur, il n’y a pas de pompes (à cause de
leur manque de fiabilité). Il est à
noter que, ce qui dimensionne un satellite, n’est pas sa vie orbitale mais la
poussée énorme qu’il reçoit lors de son lancement.
Technologie des
réservoirs :
les réservoirs de carburant sont en Titane. On utilise des technologies
composites drapées (sorte de liner en Kevlar/carbone) pour le stockage Haute
Pression. On a ainsi des bouteilles d’Hélium de 100 litres. Les essais et
remplissages sont des opérations importantes : on vérifie l’étanchéité des
réservoirs, on fait des contrôles fonctionnels lors du remplissage du
carburant.
Nicolas
passe alors un film sur le remplissage dans lequel nous voyons les opérateurs
opérer sous scaphandre avec air ventilé. Les liquides en micro-gravité
posent problème (voir la séquence du whisky du Capitaine Haddock). Deux
technologies sont utilisées :
1) on place une membrane
entre le gaz et le liquide (réservoir à membrane)
2) on utilise la
capillarité (réservoirs à tension de surface). Des crépines placées dans le
réservoir : l’une d’elles est toujours mouilée
par le liquide (Ex : SPOT Type SNECMA). On utilise aussi le procédé éponge
avec des alvéoles en nid d’abeilles (qui crée une tension de surface).
Fin de vie des
satellites :
le contrat du CNES est clair : il faut gérer les restes d’ergols. Le
problème est de connaître avec précision la quantité de liquide restant dans
les réservoirs lorsque le satellite atteint la fin de sa mission. IL y a
obligation de déorbiter alors le satellite (on le
place sur une orbite à + 300 km
dans le cas des satellites de télécommunication ou on le fait brûler par retour
dans l’atmosphère pour les satellites sous faible altitude). Il y a nécessité
de libérer l’orbite lorsque la mission du satellite est terminée. Il existe des
effets de jet les tuyères sont très
écartées : les
jets lèchent les surfaces adjacentes. On simule les comportements par modellisation.
En conclusion : le graphique ci-dessous
montre la complexité des missions en fonction de la distance de la planète au
soleil (en Unités Astronomiques UA)
0,1 UA 1 UA (La
terre) Saturne 100 UA
La soirée s’est terminée
vers 22h30 par un « pot de l’amitié » préparé par l’UTBM et une démonstration sur les maquettes des lycéens du
Lycée VIETTE.
Rédacteur : Jean-Pierre BULLIARD
Président de l’URIS de
Franche-Comté
Président des Ingénieurs INSA de Franche-Comté
Pour le compte du Pavillon des Sciences