U R I S F C
UNION
REGIONALE DES INGENIEURS
ET DES SCIENTIFIQUES DE FRANCHE-COMTE
Compte-rendu de la
conférence du 20 novembre 2008
« CLIMAT OU
VAS-TU ? »
« Ce que nous
enseignent les glaces polaires »
Soirée organisée par : les Ingénieurs INSA, (Merci à Claude BOLARD et à Jean
RESTLE qui ont mouillé la chemise !) L’URIS-FC
en collaboration avec le Pavillon des
Sciences à Montbéliard (Merci à Pascal REMOND pour son dynamisme et son
animation) et avec la Chambre de
Commerce et de l’Industrie du Territoire Belfort (Merci à Aline LALOUX pour
son travail constant au fil des ans) et merci à tous nos partenaires : ALSTOM Power pour son financement, le Conseil Général 90 pour son aide
matérielle, les journalistes de l’Est
Républicain, France-Bleu et tous
ceux qui ont participé et qui ne sont pas cités ici. Signalons
qu’ « ALSTOM Power » est engagée dans les projets de capture du
gaz carbonique contenu dans les fumées rejetées par les centrales thermiques.
La conférence est inscrite au programme des
manifestations de l’ANNEE POLAIRE INTERNATIONALE et dans le programme régional
de la FETE de la SCIENCE organisée par le Pavillon des Sciences.
Signalons que la semaine précédente, Claude
LORIUS, le
glaciologue français, directeur de recherche émérite du CNRS et membre de
l'Académie des Sciences, a été choisi comme lauréat du prix "Blue Planet"
de la Fondation japonaise de soutien à la recherche scientifique Asahi Glass, a
annoncé jeudi cette dernière. Ce prix est l’équivalent d’un « Prix Nobel
de l’Ecologie ».
Lieu et Horaire : Salle de Conférences de la Chambre de Commerce et de l’Industrie du
Territoire de Belfort
à 20h30.
Participation : très bonne, l’auditorium était
plein (180 personnes).
Participant URIS FC : nombreux participants, dont les
Ingénieurs INSA, AM, UTBM.
Intervenants : Frédéric PARRENIN, du
Laboratoire de Glaciologie et Géophysique de l’Environnement (Grenoble),
Médaille de Bronze du CNRS, disciple de Claude LORIUS.
Invitée : Madame
RAYOT Déléguée
France Météo à Belfort pour participation au débat.
Le conférencier
évoquera les circonstances d’ une mission en Antarctique,
développera les connaissances concernant l’évolution du climat dans le passé,
parlera des projections scientifiques pour l’avenir et répondra aux
questions »
La conférence :
1)
L’expédition
et le recueil de carottes de glace
Frédéric
PARRENIN nous passe les diapositives de l’expédition franco-italienne en
antarctique, à laquelle il participa en Novembre 2005, près de la base Dumont
d’Urville, en Terre Adélie. Il atteint la base italienne construite vers 1980.
Cette base contient en permanence une trentaine de personnes. Il montre de
superbes photos du volcan recouvert de glace, le Mont Melbourne, proche de la
base et des photos des animaux qui y vivent (des oiseaux à forte envergure et
un couple de manchots empereur, puis une colonie de milliers de ces oiseaux à
Cap Washington). Il montre des engins de caméra et de capteurs sous la glace.
La température locale varie du plus chaud (-5°C) au plus froid (-40°C). Il
indique que sur cette terre antarctique, les grandes nations se sont partagé
les lieux par grands secteurs géographiques (américains, russes, français,
italiens, allemands, belges, japonais et récemment, les chinois). Mais c’est
Claude LORIUS, le maître à penser de Frédéric qui, véritablement, a permis la
collaboration en antarctique entre russes, américains et français. (il ajoute
malicieusement que les verres de Vodka contribuent à rapprocher les peuples)…
Frédéric
PARRENIN lors de l’expédition La
salle attentive le soir de la conférence
La mission
de Frédéric consiste à recueillir par forage une carotte de 600M de hauteur
pour y analyser les gaz enfermés en suspension, permettant de remonter au
climat depuis environ 5000 ans. Il y a en effet une relation très étroite entre
les gaz présents dans les bulles de la carotte (surtout les isotopes Hydrogène,
Deutérium) : ce sont les isotopes lourds qui se condensent
préférentiellement. Plus il fait froid, plus les isotopes lourds sont appauvris
dans les bulles analysées, d’où la possibilité de pouvoir tracer des courbes de
température en fonction du temps passé. La carotte laisse un trou creux
remplacé alors par un liquide de même densité que la glace, pour éviter que le
trou ne se rebouche et pouvoir faire des mesures. Ces mesures physiques, dans
le trou de forage, sont essentiellement : la température et le mouvement.
Frédéric montre alors l’atelier construit dans la glace polaire et son
aménagement. Le tunnel ainsi aménagé permettra de recueillir les carottes sur
une table d’analyse, de faire les premières mesures (conductivité de la glace
permettant de déterminer, en fonction du temps, l’existence d’éruptions
volcaniques). Les carottes prélevées sont fixées au bout d’un câble et ramenées
en horizontal sur la table d’analyse. Après ces premières analyses, les
carottes sont coupées en morceau, les morceaux sont identifiés (traçabilité) et
emballés puis renvoyés sous convoi frigorifique en France au CNRS pour analyse
du contenu des bulles. Frédéric, arrivé en avion, est reparti avec le bateau
« L’ASTROLABE »
2)
Les
enseignements tirés des mesures effectuées sur les carottes recueillies
Il y a en
tout, en Antarctique, seulement 9 emplacements sur lesquels des carottages ont
été effectués (dont celui sur la base franco-italienne). 5 forages profonds
seulement ont été effectués au Groenland. L’emplacement qui remonte le plus
loin dans le temps est en Antarctique à « DOME C » (qui atteint
800.000 ans de recherche climatique).Mission européenne EPICA , longueur de la
carotte : 3 Km
Frédéric
nous montre une courbe d’analyse des températures (variation du climat) en
fonction des ères géologiques, depuis la formation de la terre -4.600.000.000
d’années à nos jours. Nous y voyons clairement des alternances de périodes
chaudes et froides tout au long des millénaires. Il rappelle que c’est grâce à
la tectonique des plaques que l’atmosphère existe.
Les mesures sur les
échantillons de
carottes sont de 4 types :
·
Mesures
dans la glace : l’eau H20 et ses isotopes : H2 18O
et HDO, détermination de la T° de l’époque
·
Mesures de
l’air sous
pression contenu dans les bulles incluses : CO2 , CH4 ,
N2 O, d15N, d40Ar, et d 18O, détermination de la composition
de l’atmosphère
·
Mesures
des impuretés : Poussières, Sel Marin, 10Be, Aérosols Volcaniques (la cendre
des laves volcaniques insérée permet de comprendre quand les éruptions se sont
produites),
·
Mesures
des cristaux : leur taille, leur allongement, leur orientation.
Tous les
forages précédents (comme celui de Vostok dans les années 1980) ont permis de
déduire les lois suivantes, vérifiées et corrélées sur chaque
forage (c’est ce qu’on appelle la théorie
astronomique des paléoclimats : les changements climatiques sont gouvernés par des
changements d’insolation) :
·
L’orbite
terrestre subit des variations d’excentricité (de périodes allant de 100.000 à
413.000 années),
·
L’obliquité
de l’axe de rotation de la terre (dont l’angle moyen est de 23°3) subit aussi des variations
(de périodicité égale à 41.000 ans),
·
La précession de l’axe de rotation et la rotation de
l’orbite terrestre (précession des
équinoxes) subit
aussi une variation (de périodicité variant de 23.000 à 19.000 ans),
Ces 3
variations provoquent en un lieu donné sur la terre une variation
d’ensoleillement, donc une variation de climat.
Les mesures sur les carottes de glace confirment ces variations durant
les 400.000 dernières années.
L’effet de serre :
Frédéric
rappelle que l’atmosphère est « opaque » vis-à-vis des rayons Infra-
Rouges émis par la terre et « transparente » vis-à-vis des rayons
solaires.
Les 3
courbes en fonction du temps : la température, le taux de CO2
,et le taux de CH4 , sont parfaitement corrélées.
Les courbes
isotopiques mesurées par l’EPICA (European Project for Ice Coring in
Antarctica) sont aussi parfaitement corrélées.
3)
L’homme
et le climat
Un Groupe
Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC – en anglais IPCC) a été
créé en 1988 à l’initiative de l’OMM et du PNUE (Nations-Unies). Ce GIEC a créé
3 groupes de travail (un sur les Sciences du Climat, un sur les Impacts et un
sur les Aspects Socio-Economiques). Son objectif est d’établir un diagnostic.
Il a publié 4 rapports circonstanciés de plus de 800 pages chacun (en 1990,
1995, 2001, 2007). Ses principales conclusions sont les suivantes :
·
Les activités humaines modifient la composition de
l’atmosphère en gaz à effet de serre : le taux de gaz carbonique a été
multiplié par 1,35 depuis le début de l’ère industrielle. Sur la même période,
le taux de méthane a été multiplié par 2,3 et celui de protoxyde d’Azote par
1,20.
·
Depuis le début de l’ère industrielle, la quantité d’énergie
disponible pour « chauffer » les basses couches de l’atmosphère a
augmenté de 2,3 Watts/m2 (de 240 à 242,3),
·
On constate une
hausse globale de température de 0,6°C durant le 20 ième siècle,
·
Depuis 1850, parmi les 12 années les plus chaudes, 11 se
trouvent dans les 12 dernières années de 1996 à 2007,
·
Le réchauffement est plus fort sur les continents et dans
les hautes latitudes nord,
·
Le niveau des mers a monté de 17 cm pendant le XXème siècle,
avec un gradient de 18 cm/siècle de 1961 à 2003 et de 31 cm/siècle de 1993 à
2003,
·
Entre 1993 et 2003, l’expansion thermique y contribue pour
16cm/siècle, la fonte des glaciers pour 8 cm/siècle , celle des calottes
polaires pour 2 cm/siècle et celle de l’Antarctique pour 2 cm/siècle,
·
Les années 1950 à 2000 sont plus chaudes que n’importe
quelle autre cinquantaine parmi les 1300 dernières années,
·
Les modèles climatiques utilisés ne peuvent pas expliquer le
réchauffement des 50 dernières années sans prendre en compte les effets
anthropiques,
·
A contrario, les modèles climatiques peuvent expliquer le
réchauffement des 50 dernières années en prenant en compte les effets
anthropiques,
·
Le GIEC caractérisait l’influence des activités humaines sur
le climat comme « an ne sait pas » en 1990, « peut-être »
en 1995, « probablement » en 2001 et « très probablement »
en 2007.
4)
Que
va-t-il se passer à l’avenir ?
Différents
scénarios ont été utilisés selon la croissance économique et l’évolution
démographique pour prévoir la température et le climat entre 2020 et 2100, puis
jusqu’à 230O. Le GIEC conclut que l’effet de serre va continuer à augmenter et
que climat va continuer à se réchauffer ( de 1 à 6°c selon les hypothèses).
Mais il existe de nombreuses incertitudes créant des risques de
surprises sur :
·
Les amplitudes du changement climatique (température et
niveau de mer),
·
Les caractéristiques régionales,
·
La modification des précipitations,
·
Les extrêmes climatiques (tempêtes, tornades…),
·
Les autres forçages climatiques,
·
Les rétroactions et couplages (chimie/climat, biosphère,
océan),
·
Les surprises climatiques !
Tous les
scientifiques s’accordent à dire que l’élévation de température sera plus
marquée sur les continents ( particulièrement ceux du Nord) que sur les océans,
que la sécheresse sera plus accentuée là où les précipitations sont déjà
insuffisantes
5)
Conclusions
de la conférence :
Frédéric
PARRENIN croit éminemment en l’homme et pense qu’à terme, les états du monde entier et les habitants de
la planète sauront réagir et éviter les catastrophes en prenant les dispositions
écologiques qui s’imposent dans leur mode de vie.
La soirée s’est terminée
devant un verre de l’amitié. Merci à la CCI du Territoire de Belfort et aux
organisateurs !
Site internet : http://parrenin.frederic.free.fr/
Rédacteur : Jean-Pierre BULLIARD
Président de l’URIS de Franche-Comté
Président des Ingénieurs INSA de Franche-Comté
Pour le compte des Ingénieurs INSA organisateurs