Compte-rendu de
la conférence du 6 novembre 2008
A l’UTBM
« Le
Management par la Confiance»
Soirée organisée par : l’ « UTBM »
et animée avec dynamisme par Aude PETIT (UTBM) en partenariat avec didier
SENTENAS (pastorale des jeunes, le MCC et ACI)
Lieu et Horaire : Université de technologie de Belfort-Montbéliard, site de Belfort
bat .A, Amphi A200, entrée 8
boulevard Anatole France. Horaire : 20h20 à 22h00
Participation : très bonne, l’amphithéatre était
plein. Le MCC (Mouvement des Cadres Chrétiens) était représenté.
Participant URIS FC : Jean-Pierre BULLIARD (INSA) - Claire-Edith BERGER (INSA) – Jean MEMBRE
(ENSMM)
Intervenants : Gilles Le Cardinal, Maître
de Conférences à l’UTC Compiègne.
Pascal
FOURNIER, Directeur de l’UTBM,
Aude
PETIT, Responsable des Affaires Générales et Culturelles à l’UTBM.
Aude
PETIT introduit la conférence. Pascal Fournier présente ensuite l’UTBM
et ses 2400 étudiants.
Gilles Le Cardinal se
présente et présente la méthode. Il est Ingénieur
en Automatique et fut enseignant à l’UTC Compiègne. En 1980, Monsieur VANNIER
lui demande d’accompagner 3 adultes handicapés mentaux sans éducateur
permanent. Il y a découvert des processus humains extraordinaires liés à la
perte de confiance en soi. A travers des conflits épouvantables, il a cherché
comment se relever. Au bout de 3 ans, il demande un changement de discipline et
touche à la science de l’information et de la communication. Il étudie les
causes d’échec de la communication humaine : phénomènes de construction,
déconstruction et reconstruction de la confiance. Il fait une thèse sur la
modélisation des processus de reprise de confiance. Deux ans plus tard, il
développe la méthode PAT-Miroir,
méthode de construction de la coopération et de résolution de conflits qui
compte aujourd’hui 15 animateurs certifiés et 5 cabinets agréés décrite dans
son livre (voir référence en fin de ce compte-rendu). Actuellement, on parle
beaucoup de confiance mais on est dans un processus de sécurisation par les
normes pour remplacer cette confiance qu’on n’a plus. La méthode montre
clairement qu’on a tout intérêt de « Manager par la Confiance », par
opposition au « Management par le Stress » : c’est une stratégie
« gagnante-gagnante » pour l’entreprise, ses managers et ses
collaborateurs.
Peut-on manager par la
confiance ?
On va se
donner une nouvelle tâche qui va changer les relations dans l’entreprise. Il
n’existe, finalement, que deux modes de management : « par le
stress » ou « par la confiance ». Pour être motivés dans notre
travail, nous avons besoin d’avoir des domaines de compétences et des défis,
nous aurons une « zone proximale d’apprentissage ».
La confiance au quotidien
dans l’entreprise :
La
confiance agit partout dans l’entreprise :
·
A l’embauche, lors des entretiens d’évaluation, lors des
licenciements,
·
Lors de la construction des équipes et pour la coopération
inter-services,
·
Pour la gestion des sous-traitants et fournisseurs,
·
Dans la gestion de projet (par la délégation des
responsabilités),
·
Dans le management de la sécurité et de la gestion des
risques,
·
Pour la prise de décision (en concertation),
·
Dans la gestion des changements et lors des conflits
syndicaux,
·
Pour les prêts et les assurances,
·
Dans les styles de management,
·
Dans les relations avec les actionnaires.
Les difficultés d’un
pilotage de processus à deux : cooper-action et copilotage d’un
processus :
Soit le
processus « prendre une douche » pour lequel on impose deux paramètres :
une température de 30°C et un débit d’eau de 50l/mn. Si on met deux pilotes (un
pour chaque paramètre), on n’arrivera jamais à obtenir les deux critères en
même temps, si les deux pilotes ne se parlent pas. Le schéma d’un tel processus
est le suivant :
Processus : La Douche
Pilote 1
Eau
chaude Consigne Température : 30°C
Température
Débit
Sortant
Débit
Consigne
Débit : 50 l/mn
Eau froide
Pilote 2
L’expérience
montre qu’il est impossible d’atteindre les 2 objectifs en même temps si on ne
coopère pas.
Exemples de
phénomènes à retard : les « sub-primes » : on a d’abord pris
de petits risques il y a 5 ans, puis des risques de plus en plus élevés et la
catastrophe est apparue 5 années plus tard.
Règle générale : les 3
étapes :
1)
Il n’y a pas qu’un seul objectif dans une équipe mais chacun
a de multiples objectifs. Pour pouvoir travailler ensemble, il faut donc se
dire tous les objectifs, tels que chacun les a en tête. On fera ainsi
apparaître des objectifs communs, d’autres spécifiques et, enfin, des objectifs
contradictoires. (Exemple : Coût – Qualité et Sécurité).
2)
Se transmettre ses informations.
3)
Se dire ce qu’on fait et, ensemble, essayer de comprendre
les relations de causes à effets entre nos propres actions et les résultats
obtenus. Il faut alors construire un modèle de ce que représentent nos actions
et leurs interdépendances puis trouver ensemble la stratégie coordonnée qui
permettra d’atteindre les objectifs multiples.
Modélisation de la cognition
et de la communication :
MODELE COGNITIF : JE COMMUNICATION INTERPERSONNELLE MODELE COGNITIF : TU
JE
– TU
?
Je Tu
?
CONTEXTE
Plan :
1)
Entrer dans le paradigme de la complexité,
2)
Modélisation de la cognition humaine,
3)
Modélisation de la communication,
4)
Modélisation de l’interdépendance,
5)
Modélisation de la coopération,
6)
Méthode PAT-Miroir (QSE, DD…)
Par
exemple, l’optimum des coûts est souvent contradictoire avec l’optimum de la
qualité. Il faut donc que chaque responsable connaisse les problèmes de l’autre
pour chercher des solutions satisfaisantes.
Entrer dans le paradigme de
la complexité :
Gilles Le
Cardinal montre à l’écran une image qui peut apparaître à la fois comme celle
d’une vieille femme ou celle d’une jeune femme. Il faut arriver à ce que chacun
voie l’une et l’autre. Pour cela on recherche un processus cognitif qui permet
de voir les deux images : on va prendre un détail du dessin : les
traits d’un énorme nez chez la vieille, une joue, un menton, pour passer du
global au détail local permettant de voir les deux images. On prend ensuite le
trait de la bouche édentée entre-ouverte chez la vieille ou le cou, le
décolleté, le collier de soie tendu sur le cou chez la jeune. Autre
détail : un œil avec une poche sous l’œil ou une oreille. On constate
alors que quand on est au niveau du détail, on peut voir la double
interprétation, ensuite, il suffit alors de remonter à l’image globale. On
passe alors du processus « on voit la jeune femme ou la vieille » au processus « on voit la jeune femme et la vieille ». Cela permet de
rentrer réellement dans l’intelligence de cette complexité.
Paul
WATZLAVICK a dit que toute situation, tout évènement, peut être recadré
positivement ou négativement (exemple, dans un mariage, on peut voir à la fois
un évènement heureux et malheureux ; dans la naissance d’un bébé, on peut
voir à la fois une joie et une peine etc.). Il faut donc rentrer dans la
complexité des situations et faire preuve d’intelligence. Gilles Le Cardinal
ajoute que toute personne peut être recadrée positivement ou négativement. Il
montre qu’il faut se méfier de l’apparence. Ainsi ce qui apparaît comme une
spirale à l’écran n’est, en fait, qu’une association de cercles bien
concentriques (ceci est prouvé lorsqu’on suit une ligne avec son stylo). Nous
passons ainsi notre temps à simplifier le réel, de façon illégitime. Mais Edgar
MORIN se pose précisément la question sur la légitimité de cette
simplification. C’est aussi notre objectif individuel qui va rechercher une
représentation simplifiée pour pouvoir l’atteindre. En particulier, nous ne
voyons pas les mêmes choses suivant que l’on est observateur ou acteur.
Exemple : une image pixellisée de façon trop grossière ne permet pas d’en
voir le sens. En clignant des yeux, on voit alors apparaître la tête d’Albert
Einstein. Contrairement à ce que l’on voit, c’est en saisissant les
interactions, en voyant de loin, que l’on peut comprendre. Ainsi, la façon de
découper un projet peut rendre impossible sa compréhension (Etudier la
circulation sanguine en coupant la tête et les membres d’un corps humain ne
mène pas à la compréhension du phénomène). Il faut donc savoir bien découper le
phénomène complexe pour le comprendre.
Les dialogiques à l’œuvre
chez l’être humain :
L’être
humain est en permanence soumis à des logiques contradictoires, deux logiques
qui s’affrontent sans synthèse. Exemples :
·
Unicité de la personne / humanité commune,
·
Doté de capacités d’actions / Défaillant,
·
Libre / sous de multiples contraintes,
·
Autonome / dans un niveau de dépendances,
·
Communiquant / dont l’essentiel est incommunicable,
·
Sociable / Individualiste,
·
Doté de capacités d’apprentissage et de mémoire / Sujet à
l’erreur et à l’oubli,
·
Aspire à aimer et à être aimé / est aspiré par de multiples
conflits
Les a priori en faveur de la
non-concertation :
·
Moi tout seul suis capable (on n’a pas besoin de coopérer),
·
Pour être efficace, minimisons les interactions,
·
C’est à l’utilisateur, à l’usager, à l’habitant de
s’adapter,
·
Les expertises et les solutions sont additives (ceci est
contraire au théorème de Pellmann qui dit que dans un système composé de
sous-systèmes interactifs, la solution optimale de l’ensemble n’est pas la
solution optimale de chaque sous-ensemble.
·
La coopération est garantie par contrat.
Notons que
pour réaliser une tâche inhumaine, le robot est meilleur que l’humain.
Si l’on
veut faire un moteur hybride thermique et électrique, il faut faire travailler
ensemble les spécialiste de chaque technologie et ne pas leur laisser faire
chacun leur conception.
Les principes de la
concertation :
Par opposition
au paragraphe précédent :
·
Ensemble, nous serons capables,
·
Pour être efficaces, organisons et structurons des temps de
travail ensemble,
·
Soyons à l’écoute des utilisateurs, des usagers et des
habitants qui sont des experts du problème,
·
Les experts ont besoin de coopérer pour élaborer des
solutions satisfaisantes,
·
Les experts ont besoin de méthodes pour apprendre à
coopérer.
Proposition de définition
simple d’un système complexe :
·
C’est un système au sein duquel des acteurs :
o
Construisent des représentations,
o
Utilisent des logiques, élaborent des objectifs,
o
Subissent des contraintes, se fondent sur des critères
d’évaluation.
·
De leurs interactions émergent des processus imprévus :
o
Favorables (ex : des innovations),
o
Défavorables (effets pervers, accidents, conflits),
qu’il s’agit de conduire de façon satisfaisante sans qu’il
soit possible de les maîtriser totalement.
Système complexe :
1)
Emergence : imprévisibilité > promesse tenue,
engagement assuré, aléa positif / aléa négatif, accueil / fermeture à la
nouveauté.
2)
Récursivité : irréversibilité > travail sur
l’erreur, apprentissage – pardon / culpabilisation – réciprocité / apport
unique.
3)
Dialogique : inter-culturalité > identification des
différences – dilemmnes / dialogiques – Incompréhension / intercompréhension –
Fécondité / stérilité.
4)
Hologramme : Interdépendance > écoute mutuelle,
communication, couplage des revenus.
Modélisation de
l’interdépendance :
« Je »
possède deux choix et « Tu » possède deux choix. Ainsi 4 évènements peuvent
advenir, qu’on va suivre solidairement :
Tu Choix 0 Choix
1
Je
Choix
0 Evènement e1 Evènement
e2
Choix
1 Evènement e3 Evènement
e4
L’unité
d’information, selon Shannon, est le « Binary Digit », qui
a donné le Bit (0 ou 1).
« Je »
et « Tu » vivent en unité d’interaction : ils sont libres et
dotés de préférences. La situation d’interdépendance implique qu’aucun d’eux ne
peut atteindre l’évènement de son choix. Ils dépendent l’un de l’autre.
L’unité
d’interaction est le « Bit au Carré ». Cela explique la structure
fondamentale de tous les conflits : chacun a un raisonnement vrai mais
partiel et partial.
Nouvelle conception d’une
interaction (méthode PAT-Miroir) :
JE TU
JE Peurs Peurs
Attraits Attraits
Tentations Tentations
TU Peurs Peurs
Attraits Attraits
Tentations Tentations
Chacun
analyse ses propres « Peurs, Attraits, Tentations » (PAT) et
imagine les « Peurs, Attraits, Tentations » (PAT) de l’autre.
Il y a donc 3 questions structurales pour décrire une interaction :
·
Quelles sont les Peurs
possibles ?
·
Quels sont les Attraits
possibles ?
·
Quelles sont les Tentations
possibles ?
La Cécité
Mentale (théorie de l’Esprit) s’oppose à la Clairvoyance, à la compréhension
des motivations qui expliquent le comportement des autres.
ATTIRANT
N
ATTRAITS TENTATIONS
O
N
Attirant
Non-Ethique Attirant
Ethique E T
H
I
E Q
PEURS Eventualités A affronter PEURS Eventualités A éliminer
T U
H E
I
Q
U
E Repoussant
Non-Ethique Repoussant
Ethique
REPOUSSANT
LES
TENTATIONS
LES PEURS LES
ATTRAITS
Scénario
Menant
à
L’échec
Scénario
Scénario
Catastrophe Idyllique
Ensemble on
va reconstruire et trouver les préconisations :
·
Précautions pour faire baisser les
peurs
Fonds Communs d’Evidence Moyens d’atteindre les objectifs souhaitables
·
Règles pour limiter les tentations
On
construit ainsi un management des risques du projet en faisant appel à la
créativité du groupe de travail. Et le groupe va découvrir les valeurs qu’il a
envie de vivre à travers les tentations possibles et les comportements
inadmissibles.
Définition de la valeur
confiance :
La
confiance interpersonnelle est l’énergie potentielle ou un capital accumulé
dans le passé par une histoire de prises de risques réussies ou échouées avec
une autre personne, définissant au présent l’état de la relation et permettant
de prendre ensemble un certain niveau de risques pour l’avenir.
La
confiance, c’est donc du « cash flow », du « capital ».
La
confiance se construit dans la prise de risques et permet cette prise de
risques.
Il existe
une « zone proximale d’apprentissage » qui est une zone où l’on a
tous les prérequis, toutes les chances de réussir.
Questions Réponses
Commentaires apportés par Gilles Le Cardinal à l’issue de son exposé :
1)
Question : Peut-on mettre le licenciement dans
la liste de confiance (voir fin de la page 1) ?
Réponse : de l’irrémédiable à la mutation… il
faut anticiper les processus et ne pas faire comme BASF qui a vu venir la fin des
bandes magnétiques et n’a rien anticipé. Le licenciement peut donc aussi être
un processus de confiance pour aider le licencié à retrouver du travail, s’en
occuper jusqu’au bout de cette recherche d’emploi. Cela est possible : il
est possible de licencier sans casser la confiance.
2)
Commentaire : lire l’excellent livre « Oser
la confiance » de Bertrand MARTIN.
3)
Question : Comment expliquer ce déséquilibre
entre le management par le stress et celui par la confiance ? Réponse : Gilles Le Cardinal donne tout
d’abord une mauvaise nouvelle : la coopération est instable alors que le
conflit est stable. Si nous ne faisons rien, le conflit est notre avenir
assuré. Il donne ensuite une bonne nouvelle : il est possible de stabiliser
la coopération. Mais il y a pour cela des conditions (exemple : la
réaction nucléaire est une chaîne explosive qu’on peut réguler, sous certaines
conditions, pour la maîtriser). La coopération est donc instable mais il existe
des conditions pour la stabiliser :
·
La souffrance de la différence n’est acceptable que dans la
joie de la reconnaissance, d’après Denis VASSE,
·
La coopération n’est durable que dans une alliance fondée
sur :
o
Un contrat
o
Une confiance
réciproque (il faut le contrat et la
confiance et non le contrat ou la
confiance)
o
Une éthique commune
(sans règles, on ne fonctionne pas)
o
Une fécondité.
·
Un processus majeur pour la confiance est ce que l’on fait
face à l’erreur, face à l’échec. Saurons-nous apprendre et en tirer parti pour
nous réorienter ? L’accueil de l’erreur est primordial pour en faire une
source d’apprentissage.
·
Pour la confiance, il faut renoncer à la stratégie dominante
et à la stratégie prudente. Cela implique de prendre des risques calculés.
4)
Question :
que
pensez-vous du monde virtuel ? Réponse : il vaut mieux s’entraîner sur un
processus virtuel, c’est moins risqué (ex : essais sur les souris avant de
les réaliser sur les hommes). Le problème actuel des jeunes est qu’ils passent
trop de temps à faire des jeux virtuels sur internet, cela leur donne un
apprentissage à l’irréel. Par opposition, travaillons la vie spirituelle qui
est la vie en moi des êtres absents. Les jeunes remplacent trop la vie
spirituelle par la vie virtuelle !!!
La soirée
s’est terminée devant un verre de l’amitié. Merci à l’UTBM et aux
organisateurs !
Bibliographie :
« La dynamique
de la confiance » de Gilles Le Cardinal, édité chez Dunod.
« Joies et
tourments d’un DRH » de Xavier Grenet (préface de Roger Fauroux, Editions
du Cerf 2007) ex DRH chez Saint-Gobain et ex Responsable National du MCC.
Programme
des prochains « Rendez-vous » avec l’UTBM :
·
26 novembre
2008 : à 20h00 sur le site de Sévenans : Festival Entrevue avec
passage du film « La Chair et le Sang » de Paul Verhoeven.
En présence de Gérard
Soeteman scénariste de Paul Verhoeven
·
24 janvier
2009 : journée « Portes Ouvertes » à l’UTBM
-stands
formation
-village
international avec spectacles, stands animés
et dégustations
-visites
d’architecte de l’UTBM
Rédacteur : Jean-Pierre BULLIARD
Président de l’URIS de Franche-Comté
Président des Ingénieurs INSA de Franche-Comté
Pour le compte de l’UTBM